16 janvier 2012
1
16
/01
/janvier
/2012
08:54
Calme de l'hiver. Ciel dégagé et rougeoyant au levant. Pas de vent, tout juste une petite bise pour faire " sensation de saison ". Le bon sens paysan affirme qu'il était temps, que ces matins de gelée sont dans l'ordre de la nature. Bien loin des débats à l'épate sur le réchauffement climatique, on se souvient de glace cassée à la masse pour faire boire les bêtes, et de belles glissages sur les étangs gelés. L'hiver 56 avait été doux, jusqu'à ce février de gel devenu référence. On vit le présent à l'aune des souvenirs. On ne se préoccupe pas de " devoir de mémoire " quand on prend le temps de l'aller-retour entre l'hier et l'aujourd'hui, et quand on sait trouver l'occasion de le partager. Conservatisme ? Sagesse ?
Published by Claude Burneau
15 janvier 2012
7
15
/01
/janvier
/2012
09:20
Ce que la photo ne peut pas dire ce matin : le sol compact qui craque sous le pied, le morsure du froid dès que la porte est franchie. Il y a bien, si l’on y regarde de près, de petites touches de blanc posées sur les touffes d’herbe, comme un ajout discret de peintre hésitant. C’est joli derrière la fenêtre, c’est joli bien emmitouflé dans sa parka, le bonnet sur les oreilles. C’est joli cette « heure où blanchit la campagne ». Derrière ce joli de Contemplations, il y a un départ, il y a la tristesse, il y a le chagrin. Pas jolis, les matins d’hiver, pour le SDF qui n’arrive pas à trouver le sommeil sous ses cartons. Qu’en pense l’étourneau en plein vol ? Que sait-il du joli ? quelle conscience a-t-il de l’exclusion ? et de la souffrance ?
Published by Claude Burneau
14 janvier 2012
6
14
/01
/janvier
/2012
09:29
En mon pré, depuis qu'une nuit de plus s'est éclipsée, rien ne s'est modifié. Les feuilles mortes jonchent toujours l'herbe. Les buissons ont toujours même forme, mêmes dimensions, même nudité d'hiver. Le ciel est toujours brumeux vers l'horizon. Les fils électriques servent toujours de perchoir pour les petits êtres couverts de plumes. Rien de neuf. Rien ne s'est éclipsé, si ce n'est une lettre, en ce jeu oulipien que dicte cette nouvelle en une des quotidiens.
Published by Claude Burneau
13 janvier 2012
5
13
/01
/janvier
/2012
08:49
Cent jours. Les paroles se multiplient, s'accélèrent, se durcissent. On argumente, on manoeuvre, on intrigue. On dit adversaire, on dit duel, on dit guerre. On veut persuader, on veut séduire, on veut convaincre. On occupe l'espace pour exister.
L'espace de ma prairie s'éveille à un nouveau jour. Comme le cent-unième et comme le quatre-vingt-dix-septième le transport scolaire fait son travail de transport scolaire. Ce matin l'aubépine goutte la pluie de la nuit. Un corbeau croasse sur le fil électrique. Il me semble bien avoir entendu : "cent - jours - m'en - fous".
Published by Claude Burneau
12 janvier 2012
4
12
/01
/janvier
/2012
12:11
Matin gris. Pas de ce brouillard épais qui, selon l'humeur du jour, peut être gangue angoissante ou cocon protecteur. Juste une petite brume qui estompe le lointain, rapproche le ciel, dilue les couleurs. Un matin où l'on n'a pas envie d'accélérer le rythme, où il est doux de laisser couler le temps. Un matin de plus, dans la fraîcheur bienveillante d'un hiver qui n'en finit pas de s'installer. Un matin propice à la procrastination.
Published by Claude Burneau
11 janvier 2012
3
11
/01
/janvier
/2012
09:04
Vous ne la voyez pas, et pourtant elle est là, dans mon dos, qui veille sur cette photo. Quand je suis sorti, elle s'est imposée, impudique dans sa blancheur dévoilée. Pleinement féminine. Fémininement pleine. Et puis je lui ai tourné le dos, mais je sens sa présence. C'est elle qui a lavé le ciel pour que le jour se lève plus tôt. Elle accompagne la naissance du soleil. Pas en servante. En maîtresse. Elle connaît sa puissance, sait qu'elle contrôle la respiration des océans, que les plantes lui sont soumises, que son cycle est celui de la vie. Elle n'a que faire de la prétention des hommes à remettre en cause ses pouvoirs. Dans moins de deux semaines, elle se renouvellera. Elle seule sait ce qu'elle a programmé : cycle de froid, cycle de de pluie, cycle de vent. Ceux qui l'aiment l'attendent. Leur impatience l'indiffère. Féminine, vous dis-je.
Published by Claude Burneau
10 janvier 2012
2
10
/01
/janvier
/2012
09:01
Ce matin la brume efface le lointain. Le regard se concentre sur la prairie. Et les poteaux électriques. Je viens d'écouter Cécile Duflot. Il était question de l'impact des éoliennes, mais aussi des lignes à haute tension, sur les paysages. Devant ma phot du jour, je focalise sur ces poteaux électriques. Est-ce qu'ils défigurent ? Qu'est-ce qui défigure ? A partir de quels éléments objectifs peut-on affirmer qu'un paysage est défiguré ? C'est vrai, dans l'idéal, je préférerais que ces poteaux électriques n'existent pas. Pour l'homoginéité d'une photo "nature" ? Parce qu'ils sont marque trop présente de l'activité humaine ? Mais ces verticales équilibrent l'image au même titre que les arbres, ils me permettent de causer des oiseaux sur les fils... Dans dans le quotidien je ne les vois pas, et je suis certain que ceux qui sont au bout des fils refuseraient leur disparition, à moins d'une alternative immédiate.
Tout ça me semble bien subjectif, sous-tendre des considérations plus profondes, et pas seulement esthétiques.
Published by Claude Burneau
9 janvier 2012
1
09
/01
/janvier
/2012
08:58
Sons du lundi. Sons des jours ouvrés. Les sons des voitures l'emportent sur ceux des oiseaux. Un peu avant 9h, c'est l'heure où l'on conduit les enfants à l'école. À la campagne, les enfants ne partent pas seuls à l'école. C'est planifié, organisé et efficace. Il leur faudra attendre la cour de récréation pour retrouver les copains. Ils perdent juste ce temps de rêverie possible sur le chemin, à pied ou à vélo. Ils perdent la tentation de bifurquer vers d'autres chemins dits buissonniers. Ils y perdent un peu de cette autonomie qu'on va user de l'énergie à leur inculquer au fil des heures de classe. Mais aller à l'école à pied, ou à vélo : trop long, trop dangereux, trop compliqué, trop fatiguant, trop "je suis pas un bon parent", trop...
De la chambre à la salle de bains, de la salle de bain à la voiture, de la voiture à la cour, de la cour à la classe. pas vu les couleurs du ciel ce matin, pas vu le soleil qui se faufile tout rouge à travers sa persienne de nuages.
Pas de nostalgie du temps où on faisait des kilomètres à pieds par tous les temps avec la gamelle de son déjeuner en bandoulière. Juste assumer les évolutions, en ayant conscience de toutes leurs facettes.
Published by Claude Burneau
8 janvier 2012
7
08
/01
/janvier
/2012
08:43

C'est d'abord le caquetage des étourneaux réunis près du poteau électrique (vous devez pouvoir les deviner le long du fil) qui retient l'attention. Si l'on se concentre sur les sons, on reconnaît vite, en stéréo, les passereaux, rouge-gorges et mésanges. Une oie. Des tourterelles. Une pie. Un coq. Un chien. Les animaux occupent tout l'espace sonore. En sourdine une voiture. Les cloches. Et un ronflement continu dans le lointain dont je n'arrive pas à cerner l'origine, sans doute industrielle, porté loin par ce petit vent d'ouest. Ça doit être ça que certains appellent le silence, et qui effraie parfois. Pourquoi me suis-je concentré sur les sons, justement ce matin ? Peut-être parce qu'hier j'ai reçu l'avis de parution du n° 10 de la revue Cairn*, dans lequel on trouvera un de mes textes (qui est aussi sur le chemin des poètes de Durcet jusqu'en mars) qui commence ainsi : "Ne crains pas le silence..."
Comment les sons vont-ils évoluer au cours de l'année ? Ça aussi, ce serait intéressant à fixer.
* Cairn - Éditions de la Pointe Sarène - 5 traverse de l’orée du bois 06370 MOUANS-SARTOUX.
Published by Claude Burneau
7 janvier 2012
6
07
/01
/janvier
/2012
09:13
Avant d'enfiler mon ciré pour aller prendre la photo du jour (petite pluie douce et fine), je viens de refermer Les chemins de la mémoire antifasciste, de Florian Graton (éditions No pasaran, ça va de soi). Comme son titre l'indique, il s'agit de la relation d'un voyage en Espagne, avec le projet de retrouver les traces de l'histoire de la guerre civile.
Et mon carré de prairie, qu'a-t-il connu de l'Histoire ?
Tout près, un Chemin de la bataille.
Coin de bocage oublié des remembrements. Supprimer les poteaux électriques. Le paysage n'a pas dû subir beaucoup de modifications depuis 1793.
Des paysans armés de faux et de fourches qui avancent en se cachant derrière la haie du fond. Cliché.
Un soldat bleu qui s'éloigne du bivouac, et qui aperçoit une paysanne en chemin vers le lavoir. Regard échangé. Rêverie romantique.
Quand vous arrivez chez l'ami Jean-Claude, vous êtes informé : "Ici, en 1515, il ne s'est rien passé".
Dans mon carré de prairie, en 1793, il ne s'est sans doute rien passé. Et c'est bien ainsi. Mieux vaut rien qu'un massacre.
Au début janvier 2012, il se sera passé quelque chose. Qui ne sera jamais dans les livres d'histoire. Qui restera peut-être quelque temps dans quelques mémoires individuelles. Et c'est bien ainsi. Mieux vaut un blog qu'un massacre. Sans conteste. Mieux vaut un blog que rien ? Ça se discute.
Published by Claude Burneau