5 septembre 2013
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Attendre, c'est espérer. C'est imaginer aussi. Ce qui se passe de l'autre côtré de la brume, dans le gris des ailleurs. Mettre l'absence en situation. La pire ou la meilleure. Lui construire un décor, des couleurs, des sons, des odeurs. Des dangers et des bonheurs. Être là par procuration, dans cette rêverie d'action. Attendre, c'est vivre doublement.
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Entrent-ils ou sortent-ils ? Qui les conduit : le joueur de flûte ou Moïse ? Symbole d'espoir ou de désespérance ? Dans quelques heures, ils seront au sec. Plus tard, ils disparaîtront. Ça va, ça vient, au rythme des marées de la vie, les coups de blues et les bonheurs petits ou grands. Dans le petit tout seul ou le Grand Rassemblement. C'est sur le bord du saint-Laurent, et l'artiste s'appelle Marcel Gagnon 
On était venus pour les baleines, les phoques et les belugas. Les yeux rivés sur la surface du fleuve, on guette les remous et l'apparition éphémère d'un aileron. On s'amuse de la proximité joyeuse des phoques, on s'émerveille de l'apparition de la baleine à bosse, dont on se demande ironiquement si elle n'est pas arrimée là par l'office de tourisme, on compte les taches blanches des belugas. Mais c'est aussi dans le ciel que ça se passe. Par quel mystère du contrôle aérien le sillon des avions s'est-il refermé sur lui-même ? Qu'importe. Ce jour sera celui des ronds dans l'air. 
Vol d'outardes sur le Lac Saint-Jean. Elles ont accueilli les premières lueurs du jour posées sur les eaux du lac. Rassurées par le renouveau de la lumière, réchauffées par ses premiers rayonnement, repues des poissons attirés vers les eaux de surface, elles regagnent maintenant le rivage. Elles occupent le silence du matin de leur caquetage aérien. L'opéra du jour peut maintenant démarrer. Elles ont assuré l'ouverture. 
Lac Saint-Jean, Roberval. Le lac et le ciel sont en harmonie de gris, pour attendre la pluie. Le soleil à peine levé bat déjà en retraite. L'Île aux couleuvres souligne le paysage dun trait de charbon. Tout est prêt pour recevoir des averses soutenues. Tout, sauf le touriste. 
Les eaux du Saint-Laurent, sa rive lointaine, le ciel se confondent. Matières à peine suggérées. Quelques lignes structurent un paysage qui n'est plus que lumière et se recompose sans cesse. Juste se laisser porter par cet écoulement du temps. Juste épatant. 
Avoir passé sa vie à prendre des coups. Y avoir laissé sa peau. S'être fait brasser, emporter, rouler, cogner. Avoir été si peu maître de son destin, happé par une force implacable. Et finir prisonnier, entassé dans un calme sans issue. Me revient en mémoire un haïku écrit à propos d'un galet, dans "Instants d'Yeu". Il commençait par : 
Ici l'on dit "pionnier", descendant du bateau plein d'espoirs et de projets. Il est parti le cœur serré, fuyant la pauvreté. Il a l'ambition de prouver qu'il peut être utile à la terre qui l'accueillera, et conséquemment s'enrichir. Il ne demande qu'une chose : qu'on lui fasse confiance. Il ne se pose pas la question de la légitimité de sa présence sur ces nouveaux territoires. On lui érigera des statues. Ailleurs on dit "migrant" descendant du camion plein d'espoirs et de projets.Il est parti le cœur serré, fuyant la pauvreté. Il a l'ambition de prouver qu'il peut être utile à la terre qui l'accueillera, et conséquemment aider sa famille à survivre. Il ne demande qu'une chose : qu'on lui fasse confiance. Sa présence sur ces nouveaux territoires n'a aucune légitimité. On lui construit des centres de rétention. 
On est venu pour ça. C'est juste le début, mais on arrive tout de même à capturer - photographiquement - quelques jolis spécimens. Pour l'instant on se concentre sur l'intense, le flamboyant. Dans les jours à venir on s'apercevra que la véritable beauté est dans le dégradé, dans la nuance, dans le mélange. 
Changement d'espace, de continent, de culture, sans changer (ou si peu) de langue. Trois-Rivières, festival de poésie manqué de quelques jours. Cette photo s'imposait. On est à la fois dans l'humour et la lucidité. On ne se prend pas au sérieux, mais on dit les choses. Et on agit, car derrière ce mémorial il y a toute une démarche festive pour honorer la poésie. Comme, dans les jardions publics de Trois-Rivières et de tout le Québec, on fait honneur à l'art contemporain. Pas la bouche en cul de poule à la française, mais comme si de rien n'était, comme si la question ne se posait même pas. Chapeau les cousins.