Le haïku du mois :
Lavés de soleil
Derniers embruns de la nuit :
Bonjour les couleurs.
tantvaletemps
Une photo. Chaque matin, une photo prise au même endroit. Pour témoigner des modifications imperceptibles, inéluctables, du temps qui passe et du temps qu'il fait. Il y aura bien quelques jours ailleurs, voire quelques jours sans. Ainsi va le temps, dans cet espace de liberté qu'il laisse aux hommes, certain qu'il est d'avoir le dernier mot. Quelques mots. Pour dire les humeurs, les colères ou les plaisirs, le rythme des pensées qui ne se contraint pas à suivre le rythme des jours. (extrait de Jour 1)
Ce projet a duré "en temps réel", du 1er janvier au 31 décembre 2012. Les articles de 2013 sont des retours sur les jours ailleurs de 2012.
Le haïku du mois :
Lavés de soleil
Derniers embruns de la nuit :
Bonjour les couleurs.
Disparu le paysage. Gommé. Disparu le troupeau. Enfoui dans la brume. C'est comme si le fondu en blanc du paysage exacerbait les sons : des coucous en stéréo, une tourterelle obstinée, un merle virulent au sommet du sapin. Il y a comme un déséquilibre, comme un désarroi. Un appel aussi : déjà le soleil tente de percer. Dans quelques dizaines de minutes, la brume ne sera plus que souvenir. Les lève-tard ne l'auront pas vécue.
Photo témoignage. Quelques mots pour vous inciter à arrêter votre regard. Elles sont arrivées. Vous n'en apercevrez qu'une. Les autres sont sur sa gauche, hors cadre. Elles n'ont pas encore arpenté toute l'étendue qui leur est attribuée. Qu'est-ce qui décide de leur parcours, dans l'herbe grasse, lumineuse et humide du matin ? Vers quoi se porte leur attention, leur curiosité ? Pour l'instant, elles n'ont pas repéré le photographe matutinal. Rendez-vous les jours prochains, pour suivre leurs pérégrinations herbagères.
Pour la photo du matin, profiter d'une embellie entre deux giboulées. Embellie. Giboulée. Plaisir des mots. Dans embellie il y a le mouvement du préfixe, la grâce du radical épanouie dans le suffixe. C'est à la fois l'éclosion des fleurs du pommier et une jupe qui tournoie. C'est du plaisir et des promesses. Si elle est promesse, la giboulée est promesse de gifle, avant de se concentrer sur la compacité de la boule, du boulet. C'est à la fois la fleur de pommier déchirée, pendante au bout de la branche et le poing serré sur une violence soudaine, incontrôlée mais éphémère. Aux saisons de la vie, de rares giboulées entre de larges embellies est peut-être une définition du bonheur.
Pendant ces cent jours ont été cités sur ce site, billets et commentaires : Allegret Yann, Amon Rê (appelé aussi Ra), Apollinaire Guillaume, Arc Jeanne d', Arham Sophia, Asunsolo Isabel, Auster Paul, Autin-Grenier Pierre, Aymé Marcel, Balzac Honoré de, Barbara, Baron Marc, Bashung Alain, Baudelaire Charles, Beauvoir Simone de, Bérard Victor, Berjon Christian, Blanche Francis, Bonnefoy Yves, Boudet Alain, Brancusi Constantin, Brassens Georges, Bratch, Bouguenec Xavier, Cantona Éric, Césaire Aimé, Char René, Chouraqui André, Cioran Emil Michel, Collard Gilbert, Dac Pierre, Découflé Philippe, Deleuze Gilles, Enzo Enzo, Emerson Ralph Waldo, Fargue Léon-Paul, Ferré Léo, François Claude (dit Cloclo), Gabriel (archange), Gainsbourg Serge, Garcia Rodrigo, Gofette Guy, Graton Florian, Guéant Claude (j'ai vérifié...), Harvey Matt, Heaney Seamus, Héritier Françoise, Hitchcock Alfred, Homère, Hugo Victor, Jaffelin Emmanuel, Jaulin Yannick, Jésus (dit le Christ), Jerphagnon Lucien, Joly Eva, Laforgue Jules, Lapointe Boby, Larousse Pierre, Lautru Michel, Lawrence D. H., Leigh Janet, Lénine, Leonhardt Gustav, Lucifer, Maupassant Guy de, Michon Pierre, Monet Claude, Morano Nadine (un instant d'égarement), Noiret Philippe, Nougaro Claude, Obrecht Philippe, Onfrey Michel, Orwell Georges, Pénélope, Pérec Geoges, Piano Renzo, Pichette Henri, Pierre (abbé), Prévert Jacques, Pronovost André, Proust Marcel, Richepin Jean, Ritsos Yannis, Romilly Jacqueline de, Ronsard Pierre de, Rossi Tino, Sadeler Joël, Sartre Jean-Paul, Shakespeare William, Siméon Jean-Pierre, Suel Lucien, Sylvestre Anne, Tordue (La), Touzeil Jean-Claude, Tricôtine, Ulysse, Waldtufel Katrin', Wellens Serge.
De quoi affoler les moteurs de recherche !
Rendez-vous du soir : quand une prairie vendéenne se prend pour la chathédrale de Rouen et cherche son Monet. (8 - 10 - 12 - 14 - 17 - 19)
Trop tard pour sortir les œufs, auraient dit les anciens Egyptiens qui, au printemps, peignaient ce symbole de la vie et de la renaissance, le posaient à l'extérieur de leur maison le soir, de manière à ce que les bienfaits de Ra les inondent dès le matin.
Tradition vidée de sa substance. De l'œuf il ne reste plus qu'une coquille de chocolat négligement jetée au sol, ou précautionneusement posée dans la fourche d'un arbre, pour permettre aux enfants de courir quelques instants, dans cette parodie de chasse convenue. Bonne conscience que se donnent les adultes pour éluder l'obésité physique et le rachitisme culturel à venir de leur progéniture.
Au fil des jours le cadre se densifie. Il y a les permanents : tronc, tiges, branches, fragonnette, piquet. Le cassis est venu s'en mêler. Il y a eu l'épisode des fleurs, étoiles ou grappes colorées. Voici venir celui du feuillage. Il s'invite déjà dans la haie, prend son temps pour manger le ciel. Dilatation de la nature. Expansion qui enserre l'échappée sur la prairie. Jusqu'à l'étouffement ?
ll y eut d'abord un premier groupe. Il s'installa loin à l'horizon, comme s'il craignait la confrontation. Bien circonscrit, il était facile de le maintenir dans l'espace qu'on lui avait octroyé. On l'observait avec curiosité. On s'extasiait avec un brin de condescendance sur la clarté des robes, les rondeurs prometteuses. On imaginait déjà la saveur de superbes bacchanales. Puis vint un second groupe. Tout aussi pacifique, mais plus proche. Les sourires se crispèrent. On commença à les compter, à se compter. À comparer. À anticiper... Et si de nouvelles vagues venaient échouer en notre territoire, jusqu'à quand pourrions-nous accepter cette présence ? Quelle serait la limite du tolérable ? À partir de quel seuil le savoureux deviendrait-il indigeste ? On discuta. On confronta les arguments. On radicalisa les discours. On campa sur les préjugés. On se déchira. On prit les armes : on arracha les piquets pour éventrer les adversaires. On sectionna les clôtures pour étouffer les contradicteurs. Elles avaient gagné.
Si la terre est notre mère, quelle est sa promesse de l'aube ? Qu'attend-elle de ses rejetons humains, et a-t-elle encore quelque illusion sur leur capacité à la satisfaire ? Sur qui a-t-elle misé ? Sur ceux qui veillent à sa quiétude, à son intégrité, ou sur ceux qui l'abreuvent du sang de leurs frères ? À l'aboutissement de leur escapade terrestre, quand ils retrouvent le secret de son sein, est-ce d'amour qu'elle les enlace ou de colère qu'elle les dévore ?