Le troupeau est parti avec le printemps. Place à Messidor, ce sont les moissons qui vont maintenant occuper l'esprit. On surveille la progression inéluctable du jaune sur le vert. On surveille le ciel aussi, redoutant le coup de vent d'orage qui fait coucher les tiges et vide les épis. Il faut préparer les machines pour le bon jour, il leur faudra supporter le travail continu, de nuit comme de jour. Les hommes, eux, ils s'adapteront. C'est le degré d'humidité qui servira de pointeuse. Si la concentration de dizaines de travailleurs autour de la machine, du pailler et du grenier fait partie du folklore rural, la solidarité n'en existe pas moins : entre voisins, on organisera le ballet des tracteurs et remorques jusqu'au dépôt de la CAVAC. Les caravaniers et camping-caristes vont grogner : la moisson va plomber leur moyenne. Mais il faut bien que ça se fasse. Il y a, dans l'excitation contagieuse du moment, comme l'affirmation revendiquée de l'expression "le fruit de son labeur", même si certains sourient de sa désuétude.